Un an après la volte-face américaine qui lui a permis d’échapper in extremis à des frappes militaires, Bachar el-Assad apparaît conforté dans ses positions, tirant profit des tergiversations occidentales et de la montée en puissance de l’État islamique.
« Il est clair qu’Assad est dans une dynamique de victoire et qu’il va finir par l’emporter », souligne Fabrice Balanche, spécialiste de la Syrie et directeur du Groupe de recherches et d’études sur la Méditerranée et le Moyen-Orient à la maison de l’Orient. « La question est de savoir à quelle vitesse il va rétablir son contrôle sur le territoire, si c’est sur l’ensemble du territoire ou s’il va laisser des zones autonomes. » « Bachar el-Assad n’est plus considéré aujourd’hui de la même manière qu’en août 2013 », lorsque Paris et Washington étaient prêts à mener des frappes contre les positions du régime, selon Didier Billion, spécialiste Moyen-Orient et directeur adjoint de l’Institut des relations internationales et stratégiques (Iris). « On est revenu à un début de jeu diplomatique, il y a eu un changement substantiel puisque jusqu’alors personne ne voulait parler avec Bachar sauf ses soutiens », analyse le chercheur.
Le rétablissement du chef de l’État syrien « par rapport à une fin annoncée qui ne s’est pas produite est spectaculaire », estime de son côté Bertrand Badie, expert en relations internationales, qui table toutefois sur une longue période de normalisation. « Par rapport à ce qu’on nous annonçait, la potence ou la Cour pénale internationale, effectivement, on en est loin », ajoute-t-il.
L’État islamique, un épouvantail
La volonté des pays occidentaux d’éradiquer l’État islamique, qualifié de « cancer » par Barack Obama, apparaît comme du pain bénit pour le président syrien qui affirme que les Occidentaux partagent désormais sa vision du conflit, lui qui a qualifié dès 2011 la contestation de son régime de troubles produits par des « groupes terroristes armés ». « Au niveau international, ça sert aussi de repoussoir, tout le monde préfère qu’Assad reste au pouvoir plutôt qu’il tombe et que l’État islamique avance jusqu’à Damas. » « Bachar el-Assad est aux premières loges pour combattre l’EI dont une partie des bases se trouvent en Syrie, explique Didier Billion. Ça va être compliqué de discuter avec Assad, c’est très déplaisant mais on n’y coupera pas. » De son côté, « la France est bien embarrassée, estime Fabrice Balanche. Laurent Fabius est critiqué pour avoir manqué de prudence, avoir fait croire que le régime allait tomber et qu’il n’y avait que très peu d’islamistes dans les rangs des rebelles syriens ». « Aujourd’hui, il n’y a plus guère que la France et l’Arabie saoudite qui sont contre le régime syrien, les États-Unis ont dit que c’était une illusion de croire que l’opposition pourrait remplacer Bachar, on a compris depuis un an que le régime allait rester en place », estime-t-il.
L’orient le jour